Nous voulons vivre en sécurité, en paix et libres : l’appel de Jean, déplacé au Nord-Kivu
Plus de 2,7 millions de personnes ont été déplacées par la crise au Nord-Kivu ; dans les sites de déplacés près de Goma, les besoins sont criants. Jean Bahati, 60 ans témoigne.
La clinique mobile de HI dans le camp de déplacés de CBCA-REGO « Lac Vert ». | © S. Lazzarino / HI
À cause des affrontements violents entre l’armée congolaise et le groupe armé non-étatique du M23, la crise au Nord-Kivu a entraîné le déplacement de plus de 2,7 millions de personnes1. La situation sécuritaire et sanitaire dans les sites de déplacés est alarmante : les besoins en eau potable, abris, protection et nourriture sont criants. Ainsi, fin avril 2024, la région comptait 2,6 millions de personnes2 en situation d’insécurité alimentaire. Face à ce constat critique, une mobilisation à grande échelle est aujourd’hui indispensable pour lever les fonds nécessaires à l’assistance aux civils déplacés et afin de faire respecter leurs droits.
Je suis devenu handicapé à cause de la guerre
Je m’appelle Jean Bahati, j’ai 60 ans et je viens de Mushaki, dans le territoire de Masisi. Je me suis retrouvé ici il y a six mois car j’ai fui la guerre. J’ai 9 enfants, 5 filles et 4 garçons, qui ont entre 26 et 5 ans. Je suis venu ici avec toute ma famille, tous mes enfants et mes petits-enfants.
Ce n’est pas la première fois que je viens ici : c’est la troisième fois en 30 ans que je suis déplacé à cause de la guerre. La première fois, c’était en 1994 et la 2ème fois en 2013. Je me souviens qu’il y avait beaucoup de balles, tout le monde fuyait et moi je suis tombé. Dans ma chute, je me suis blessé au dos, au bassin et au genou. C’est à cause des bombes que nous devenons handicapés.
L’aide dans les camps est indispensable
Avant que je ne rencontre les équipes de HI, je marchais à l’aide de bouts de bois. Quand je vivais à Mushaki, j’avais des béquilles, mais à cause de la guerre et des bombes, j’ai perdu mes béquilles en fuyant. Cela faisait 6 mois que je marchais en m’appuyant sur des bouts de bois.
Dans le camp, j’ai entendu dire que HI était présente. Je suis allé voir les équipes et maintenant je suis satisfait, car on m’a donné une béquille et j’ai pu jeter les morceaux de bois. Ici, on me donne aussi des soins, avec un kinésithérapeute qui me masse la jambe.
J’ai aussi suivi la prise en charge psychosociale : avant, j’avais des problèmes d’oubli, mais grâce à l’aide reçue, ça commence à s’améliorer. J’ai retrouvé le moral. L’aide de HI m’a permis de me rétablir physiquement et psychologiquement, et je suis aussi allé chez leur partenaire Première Urgence Internationale pour obtenir des médicaments.
Permettez-nous de rentrer chez nous
Je remercie HI pour l’aide apportée, mais il faut continuer à nous soutenir. Il n’y a pas seulement les problèmes de santé ici, il y a la faim aussi.
Ici, nous sommes dans le désert. Chez nous, on avait des champs, on pouvait les cultiver. Avant, j’étais agriculteur, regardez mes mains. Ici, c’est très difficile. On ne travaille pas. Il faut informer, mobiliser massivement pour que les gens qui occupent nos terres s’en aillent et pour que nous puissions retrouver nos champs.
Nous n’avons pas injurié Dieu, nous sommes Congolais, nous voulons juste vivre en sécurité, en paix et libres.
HI déploie des cliniques mobiles dans le Nord-Kivu, afin de renforcer l’accès aux soins de santé et d’apporter une assistance médicale et psychosociale aux populations déplacées par les conflits. De février à avril 2024, plus de 7 000 personnes ont été sensibilisées à la santé mentale et 702 personnes ont bénéficié d’une prise en charge psychosociale. Des formations sur les premiers secours psychologiques et l’écoute active ont par ailleurs été dispensées à des relais communautaires. Dans le camp de réfugiés de CBCA-REGO « Lac Vert », 590 personnes ont également reçu des soins de réadaptation physique et fonctionnelle. Enfin, au cours de cette période, HI a distribué 381 cannes et béquilles, 900 kits contenants des articles ménagers essentiels comme des ustensiles de cuisine, ainsi que 168 kits d’hygiène comprenant entre autres du savon et des protections hygiéniques.